Lors d’un stage,
organisé du 7 au 28 mars 2005 par le Centre de formation de
l’Association des journalistes du Vietnam, conjointement avec
l’Ėcole de journalisme de Lille et l’Ambassade de France à Hanoi,
nous avons parcouru plusieurs régions du pays pour faire des
reportages sur les sérieux dommages causés par l’agent
orange/dioxine sur l’homme et nbsp;l’environnement. En présentant à nos lecteurs quelques
témoignages de personnes que nous avons rencontrés, nous voudrions
appeler la conscience humaine à élever sa voix pour rendre justice
aux victimes.
 Hà Thi Hai dans le Centre de
réhabilitation fonctionnelle de la province de Thai Binh.nbsp;
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«Je m’ efforcerai de
vivre»
nbsp;
«nbsp;Parfois, je voudrais être aveugle, ou même inconsciente pour
ne pas voir ma famille endurer les pires souffrances causées par
l’agent orangenbsp;»,
a confié Hà Thi Hai, née en 1976 et originaire de Dông Hoà, une
commune de la province de Thai Binh. Deuxième enfant de la maison,
elle est la seule à n’avoir pas perdu l’usage de ses sens. Le soldat
Hà Van Công, son père, a été contaminé par l’agent orange pendant la
guerre contre les Américains.nbsp;Ses quatre enfants en ont
subi les conséquences. Hà Thi Hai, comme ses trois frères et sœurs,
a attrapé la médullosclérose, ce qui entraînera la paralysie de tous
ses membres.
Ne voulant plus être
un poids pour ses parents, elle a cherché à mourir. Mais sa famille,
ses amis et des hommes de cœur l’ont aidé à se
relever.
 Pham Viêt
Truong, 2e du concours d’échecs du district
de Tiên Phuoc, province de Quang
Nam (Centre).
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«Je rêve d’avoir une moto pour que mon père me
conduise à l’école»
Tête énorme, front
dégarni, barbe poivre et sel, Pham Viêt Truong (commune de Tiên Câm,
district de Tiên Phuoc, province de Quang Nam) a 16 ans. Pourtant,
il fait plus vieux que son âge. On pense qu’il est contaminé par
l’agent orange car son père a été affecté par ce produit toxique
pendant la guerre et a mangé des patates douces et des maniocs de la
zone blanche de Son Câm. Truong va à l’école en sautillant comme une
grenouille. Il est maintenant en 5e classe de l’école
Nguyên Ba Ngoc. L’année dernière, il a remporté le 2e
prix du concours d’échecs du district. Son rêve est d’avoir une moto
pour que son père le conduise à
l’école.
 Mme Truong Thi An soigne sa fille Nguyên
Thi Trà Giang. |
"Mon seul souhait est de
l'entendre appeler: "Papa, maman"
Chez le couple Nguyên
Van Hai et Truong Thi An, du hameau de Câm Dông, commune de Tiên
Câm, district de Tien Phuoc, province de Quang Nam, nous avons
trouvé leur fille Nguyên Thi Trà Giang, 13 ans, recroquevillée dans
son lit. De temps en temps, elle pleure subitement. Elle souffre
d’encéphalopathie et est insensible à tout. Elle ne sait rien faire
et est incapable nbsp;deparler. «Nous n’avons qu’un seul
désir, c’est qu’elle puisse s’asseoir, se déplacer et prononcer deux
motsnbsp;:nbsp;«nbsp;papa, maman». Cela suffirait pour nous
rendre heureux explique sa mère, elle-même victime du napalm
qui a déformé son visage.
 Toute la journée, Mme Thùy prend
soin de ses enfants
handicapés.
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Quant à la famille de
Mme Thùy, du hameau de Hôi Lâm, commune de Tiên Châu, district de
Tiên Phuocnbsp;: «Nous n’avons qu’un simple désir, c'estnbsp;que nos enfants
soient guéris, qu’ils nous entendent et nous comprennent. Nous
n’avons jamais voulu donner au monde de tels enfantsnbsp;: sourds,
muets, paralysés, qui n’arrivent pas à téter leur mère et pleurent à
longueur de journées. Tous les parents nbsp;veulent des enfants en bonne
santé et intelligents. Nous, nous devons accepter notre triste
sortnbsp;».
Près de 40 ans ont
passé depuis la fin des hostilités, la verdure est revenue à Tiên
Phuoc. Mais pour des centaines d’enfants nés sur cette terre
contaminée par l’agent orange, l’avenir est sans espoir.
nbsp;
 Les deux soeurs Lua, Hiêu et leur frère
cadet. |
Sombres perspectives
d’avenir
nbsp;
Lê Van Binh (hameau
de Hung Nhuong 10, commune de Vu Hôi, district de Vu Thu, province
de Thai Binh) a 9 enfants, dont 5 morts et 4 handicapés. Il a fait
la guerre sur les hauts plateaux et a été contaminé par l’agent
orange. Maintenant, il est conducteur de cyclo-pousse, et sa femme
Liên vend de la quincaillerie usagée. Le soir, la famille se réunit
autour d’un repas frugal. Lê Van Binh nous dit, les larmes aux
yeuxnbsp;: «nbsp;Maintenant que nous sommes encore bien portants,
nous pouvons gagner de l’argent pour les nourrir. Mais quand nous
serons vieux ou décédés, qui les soigneranbsp;?
nbsp;
nbsp;
Texte et photos. Hoàng
Hà
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