Vinod Ahuja, représentant l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) au Vietnam, a salué les progrès du Vietnam en matière d’agriculture durable, notamment la riziculture à faibles émissions, lors d’un entretien exclusif avec l’Agence vietnamienne d’information (VNA) à l’approche de la fin de l’année 2025.
Vinod Ahuja, représentant l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) au Vietnam, a salué les progrès du Vietnam en matière d’agriculture durable, notamment la riziculture à faibles émissions, lors d’un entretien exclusif avec l’Agence vietnamienne d’information (VNA) à l’approche de la fin de l’année 2025.
- Alors que le Cadre de programmation pays (CPP) pour le Vietnam pour la période 2022-2026 touche à sa fin, comment évaluez-vous la collaboration entre la FAO et le ministère de l’Agriculture et du Développement rural, devenu depuis le ministère de l’Agriculture et de l’Environnement, et les principaux résultats obtenus dans ce cadre ?
Notre collaboration avec le ministère a été très étroite, très concrète et très axée sur les résultats. Ce que j’apprécie le plus, c’est l’évolution de ce partenariat. Il ne s’agit plus seulement de projets individuels, mais de plus en plus d’un changement systémique. Un bon exemple en est la transformation des systèmes alimentaires.
En 2023, le Vietnam a approuvé son plan d’action national. En 2024, nous avons franchi une nouvelle étape avec l’Accord de partenariat pour la transformation des systèmes alimentaires. Ce partenariat réunit des ministères clés et plus de 45 partenaires nationaux et internationaux. Il pilote désormais la mise en œuvre de mesures dans les domaines de l’agroécologie, de la nutrition et de la réduction des pertes et du gaspillage alimentaires.
Parallèlement, le CPP a produit des résultats très concrets. La FAO a mobilisé près de 40 millions de dollars américains. Mais plus important encore que le financement, c’est l’impact.
Dans le cadre de l’approche « Une seule santé », nous avons travaillé en étroite collaboration avec le ministère pour réduire les zoonoses endémiques. Nous avons contribué à la gestion des risques majeurs tels que la peste porcine africaine et la grippe aviaire. Nous avons lutté contre la résistance aux antimicrobiens et le mésusage des pesticides. Nous avons également renforcé la surveillance des maladies animales et le système national de gestion vétérinaire.
En matière de climat, d’environnement et de ressources naturelles, nous avons œuvré au renforcement des capacités aux niveaux national et local. De la gouvernance forestière et la révision du droit foncier à la comptabilité de l’eau dans le delta du Mékong, le delta du fleuve Rouge et les Hauts Plateaux du Centre.
Par le biais du Mécanisme forêts et paysans (FFF, pour Forest and Farm Facility, ndlr), nous avons soutenu plus de 50 organisations de producteurs et plus de 2.200 ménages agricoles dans les montagnes du Nord.
Ce ne sont là que quelques exemples. Mais aujourd’hui, le CPP ne se limite pas aux projets. Il vise une transformation systémique et une forte appropriation nationale.
- Le Vietnam s’engage sur la voie d’une agriculture plus durable dans le cadre de sa « Stratégie pour une agriculture et un développement rural durables pour la période 2021-2030», qui met l’accent sur la riziculture à faibles émissions. Comment évaluez-vous les progrès accomplis par le Vietnam à ce jour, et quelles recommandations formuleriez-vous pour renforcer l’efficacité de cette stratégie ?
Le Vietnam a réalisé des progrès concrets et encourageants dans le cadre de sa Stratégie pour une agriculture et un développement rural durables, notamment en matière de riziculture à faibles émissions.
Cependant, le contexte est très difficile. Le changement climatique affecte déjà les agriculteurs. Dans le delta du Mékong, les terres s’affaissent, la salinité augmente et les ressources naturelles sont soumises à une forte pression. Certaines zones rizicoles actuelles pourraient ne plus être cultivables à l’avenir.
C’est pourquoi le Projet d’un million d’hectares de riz de haute qualité à faibles émissions est si important. Il marque un net passage: de la qualité à la quantité et et des fortes émissions aux faibles émissions, tout en renforçant la résilience. Les premiers projets pilotes sont prometteurs. Le principal défi consiste désormais à passer à l’échelle supérieure.
Vinod Ahuja, représentant de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) au Vietnam, lors de son entretien avec l’Agence vietnamienne d’information (VNA). Photo : VNAPour l’avenir, je souhaite souligner quatre priorités. Premièrement, placer les agriculteurs au cœur du dispositif. Les incitations doivent être clairement définies au niveau des exploitations. Réduction des coûts et des risques. Meilleure rentabilité pour un riz de qualité. Deuxièmement, le riz à faibles émissions doit être valorisé tout au long de la chaîne de valeur. Cela implique la traçabilité, des normes de qualité rigoureuses et des engagements de la part des acheteurs.
Troisièmement, nous avons besoin de systèmes simples et fiables pour mesurer les émissions et la productivité de l’eau. Enfin, le financement est crucial. Les fonds publics ne suffiront pas à eux seuls. Un financement mixte, incluant des financements privés, sera indispensable.
Si nous mettons en œuvre ces mesures avec succès, le riz à faibles émissions sera non seulement bénéfique pour le climat, mais deviendra également un choix économique judicieux pour le Vietnam.
- Quelles mesures le Vietnam devrait-il privilégier pour renforcer sa sécurité alimentaire et accroître sa contribution significative à la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale, notamment face à l’intensification des impacts du changement climatique et aux incertitudes économiques mondiales ?
Le Vietnam contribue déjà de manière significative aux marchés alimentaires mondiaux. Afin de préserver ce rôle et de renforcer la sécurité alimentaire nationale, je souhaite évoquer quelques domaines prioritaires.
Premièrement, nous devons investir davantage dans la résilience climatique, les mesures préventives et une protection sociale adaptée aux chocs. Les chocs climatiques sont plus violents et plus fréquents. Le typhon Yagi de l’année dernière et les multiples tempêtes et dépressions tropicales de cette année ont causé des dégâts considérables à l’agriculture, aux infrastructures et aux moyens de subsistance, en particulier dans le nord et le centre du pays. La leçon est claire : la préparation, la réactivité et la résilience des moyens de subsistance ne sont plus une option. Elles sont au cœur de la sécurité alimentaire.
Deuxièmement, la santé des végétaux et des animaux doit être protégée grâce à des systèmes « Une seule santé » plus robustes et intégrés. Les risques de maladies, notamment la résistance aux antimicrobiens, peuvent perturber très rapidement la production, le commerce et les moyens de subsistance si nous ne prenons pas les devants.
Troisièmement, le Vietnam doit être compétitif sur les marchés mondiaux en matière de qualité et de durabilité. Cela implique des normes plus élevées, une traçabilité renforcée, des chaînes de valeur plus écologiques et un soutien concret aux petits exploitants. Cela nécessite également d’investir davantage dans la traçabilité numérique, l’harmonisation des mesures de sécurité sanitaire des aliments et les contrôles phytosanitaires. De même, les coopératives et les petites entreprises ont besoin de formation, de technologies et d’un accès au financement pour que l’agriculture verte et sobre en carbone soit une réalité.
Enfin, les outils numériques, y compris l’intelligence artificielle, peuvent véritablement transformer l’agriculture et le système alimentaire. Mais ils ne sont efficaces que s’ils sont centrés sur l’humain, intégrés à des institutions solides et soutenus par des capacités et des infrastructures adéquates.
Ensemble, ces mesures permettront au Vietnam de demeurer un fournisseur mondial de confiance d’aliments sûrs, traçables et respectueux de l’environnement. – VNA/VI