Reportage thématique

L’ao dai, costume national et icône de la culture vietnamienne

À travers des milliers d'années de changements de mode, l’ao dai, la tunique  traditionnelle vietnamienne, a conservé sa fière position dans la culture vietnamienne. Conservant les traits culturels à travers les âges, l'ao dai est devenu un symbole culturel vietnamien, voire une icône.
Une longue  histoire

Bien que l'origine de l'ao dai n'ait pas été clairement définie, les historiens ont convenu qu’il est  apparu au Vietnam au début de l'ère chrétienne. Les premières femmes vietnamiennes portant l'ao dai seraient les sœurs Trung (Hai Ba Trung) (40-43 après JC), les deux premières femmes-généraux du Vietnam. La légende raconte qu'en chevauchant les éléphants pour combattre les Han, les deux dames portèrent une cuirasse ao dai à deux pans d'or.

Pour montrer leur respect pour les deux héroïnes nationales, les femmes vietnamiennes de l'époque évitèrent de porter des robes à deux pans, en utilisant plutôt des robes longues à quatre pans.





Des ao dai vietnamiens de différentes époques  exposés au musée « Ao dai Du Vietnam », dans le 9e  arrondissement de Hô Chi Minh-Ville. Photo : Thông Hai


L’ao dai est le costume principal des chanteuses de Ca tru. L’art du Ca tru est reconnu patrimoine immatériel de l’Humanité depuis 2009. Photo : Tât Son


Des artistes chantant du hat xoan en portant des ao dai. Photo : Tât Son

Les quatre pans de la robe longue symbolisèrent les quatre parents d'une femme et de son mari, témoignage de gratitude des enfants envers leurs parents. La robe eut également cinq boutons resserrés sur la poitrine gauche, ce qui représenta  les cinq vertus constantes d’une femme selon le confucianisme: bienveillance, droiture, convenance, sagesse et fiabilité.
La robe à quatre pans des femmes vietnamiennes  changea à travers l'histoire, en particulier du XVIIe au XIXe siècles, lorsqu'elle fut modifiée en une robe à cinq pans pour montrer la richesse et la position sociale d'une femme.


L’ao dai dans sa forme vietnamienne originale est définie par le dictionnaire Oxford comme « une tunique à manches longues d'une femme vietnamienne avec des pans  retombant  jusqu’à la  cheville à l'avant et à l'arrière, portée par-dessus un pantalon blanc ». 
Au début des années 1930, la culture occidentale pénétrant au Vietnam  entraîna un changement du goût esthétique pour l’ao dai.

 La tunique fut  rénovée par M. Cát Tuong, un créateur de mode vietnamienne et écrivain de Hanoi, plus connu des Français sous le nom de Monsieur le Mur (traduction littérale de son nom). Cat Tuong équipa le corsage aux courbes du corps et proposa les boutons de l’avant vers une ouverture le long de la couture de l’épaule et sur le côté. En conséquence de ces changements, l’ao dai est devenu une robe longue. La robe se divise en un pan  avant et  arrière, de la taille aux pieds.

L’ao dai  a ensuite été modifié par l'artiste Le Pho en une robe longue à col fermé à deux pans, qui avait un corsage bien ajusté et était fendue sur les côtés de la taille, laissant les deux pans tomber librement. Au début des années 1960, l’ensemble  devint un costume  populaire.


Pays natal de l’ao dai 

Le village de Trach Xa, dans le district d'Ung Hoa, à Hanoi, est connu comme le lieu d'origine de l'artisanat de couture de l’ao dai. Le village, à environ 60 km du centre-ville, confectionne  des ao dai depuis plus de mille ans. L'atmosphère s'anime à l’approche du nouvel an lunaire.

Les  commandes sont de plus en plus nombreuses. La plupart des femmes vietnamiennes dans l’ensemble du  pays portent en effet cette tunique  traditionnelle à l'occasion du Têt.  Environ 70% des familles de Trach Xa perpétuent leur métier millénaire. Les villageois   observent strictement la règle du village selon laquelle tous les enfants d’une famille de tailleurs d’ao dai doivent maîtriser les compétences de l’artisanat avant de quitter le village pour s’installer ailleurs, quel que soit leur travail.



Les tailleurs du village de Trach Xa confectionnent des ao dai.  Photo : Công Dat


Les enfants du village de Trach Xa peuvent confectionner des ao dai à l’âge de 6 ou 7 ans. Photo : Công Dat


Le tailleur Nguyên Van Nhiên, âgé de 86 ans, du village de Trach Xa,  confectionne des ao dai depuis près de 70 ans. Photo : Công Dat

Nous avons rencontré l’artisan Nguyen Van Nhien, âgé de 86 ans, dans son ancienne maison à l'architecture nordique. Apprenant le métier à l'âge de 16 ans, il  a passé toute sa vie à confectionner des ao dai, 
À travers des milliers d'années de changements de mode, l’ao dai a pu conserver sa fière position dans la culture vietnamienne.


Selon Nhien, les villageois ont transmis de génération en génération une légende des tailleurs d’ao dai de Trach Xa pour rendre hommage au fondateur du métier. La légende raconte qu'en 968, après avoir vaincu 12 seigneurs de guerre et unifié le pays, Dinh Tien Hoang monta sur le trône et se rendit à Son Tay pour recruter des talents. Là, Dinh Tien Hoang  rencontra Nguyen Thi Sen, une belle jeune fille du village de Trach Xa, qui fut une excellente couturière et brodeuse. Nguyen Thi Sen devint la quatrième reine de Dinh Tien Hoang et  introduisit  le métier de tailleur d’ao dai à la cour royale. Après la mort du roi  Dinh Tien Hoang en 979, Nguyen Thi Sen ramena ses enfants dans son village natal et enseigna le métier de couture d’ao dai aux villageois de Trach Xa.

Chaque année, lors de l'anniversaire de la création de l'ao dai fait main,  les villageois originaires de Trach Xa   retournent dans leur village pour rendre hommage à la mère de leur métier. Ces villageois, bien que vivant aux quatre coins du pays, pratiquent  leur métier ancestral, mais ont le grand mérite à  rendre l’ao dai Trach Xa  populaire dans tout le pays.


À Huê, considérée comme le "pays de l'ao dai", la tunique traditionnelle est devenue l’uniforme des écolières et de nombreux employés de l'État qui la portent le lundi.
 Les ao dai de Trach Xa sont désormais non seulement appréciés dans le  pays, mais également exportés vers l'Australie, les États-Unis, la Thaïlande et la Suède./ .

Défilé d’ao dai dans des rues hanoïennes. Photo : Thanh Giang


Le ao dai devient l’uniform d’écolières de Hue. Photo : Nguyên Luân 


Les employés d’Etat de Huê revêtent l’ao dai au bureau le lundi. Photo : archives


Le ao dai est le costume des mariages des Hanoïens. Photo : Thanh Giang 


L’ambassadrice d’Italie au Vietnam, Cecilia Piccioni,  porte un ao dai rouge du styliste Chu La, lors d’un défilé de  mode au temple de la Littérature Van Mieu- Quoc Tu Giam (Hanoï). Photo : Thanh Giang


Des collections d’ao dai des stylistes célèbres sont présentées lors d’un défilé de mode   tenu au temple de la Littérature Van Mieu- Quoc Tu Giam (Hanoï). Photo : Thanh Giang


Présentation de modèles d’ao dai au Festival de Huê 2014. Photo : Thanh Giang

Le Vietnam possède   13 héritages culturels immatériels de l'humanité reconnus par l'UNESCO, dont sept arts populaires où l'ao dai est utilisé comme costume par les artistes. Ce sont le quan ho, le ca tru, le chant xoan, le  vi giam, la musique royale de Hue, le don ca tai tu (chansons d'amateurs) et le culte des Déesses-mères. Cela montre le rôle significatif  de l'ao dai dans la promotion des  patrimoines culturels immatériels du Vietnam.
 
Texte : Thao Vy – Photos : Công Dat, Thanh Giang, Nguyên Luân et archives

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