Métiers vietnamiens

La résurgence des estampes populaires de Kim Hoàng

Kim Hoàng est le nom d’un mouvement d’estampes populaires apparu à la fin du XVIIIe siècle dans le village de Kim Hoàng, commune de Van Canh, district de Hoai Duc, en banlieue de Hanoi. Dès leur apparition, ces estampes populaires sont rapidement devenues un produit de prédilection que les habitants de la capitale se procuraient notamment à l’occasion du Têt traditionnel pour décorer leur maison.
Les estampes populaires de Kim Hoàng étaient souvent réalisées entre les 10e et 12e mois lunaire. Au début du XIXe siècle, ces estampes ont connu leur apogée. En 1915, une grande inondation a détruit la digue Liên Mac qui protégeait le village éponyme, emportant la plupart de leurs planches. Après, le métier a régressé de plus en plus, jusqu’à ce qu'aucune estampe ne fut plus fabriquée dans le village de Kim Hoàng.

Il y a une dizaine d’années, seuls quelques estampes populaires de Kim Hoàng et des planches en bois étaient conservés au Musée des Beaux-Arts du Vietnam et d’autres dans des archives vietnamiennes et étrangères. Mme Nguyên Thi Thu Hoa, collectionneuse et directrice du Musée privé de la céramique et de la porcelaine de Hanoï, a fait savoir que sa collection de peintures folkloriques compte quelque 60 exemplaires d’estampes populaires de Kim Hoàng.

Avec un vif désir de faire revivre ce mouvement disparu depuis plus d’un demi-siècle, la collectionneuse est en train de collaborer avec les peintres Nguyen Duc Hoa et Tran Nguyen Dan pour restaurer les planches. Mme Thu Hoa a partagé que « si aujourd’hui nous n’arrivons pas à maintenir cet artisanat, dans dix ans, personne n’aura plus d’archives pour le ressusciter ».



Des élèves et des touristes essaient de réaliser des dessins d’estampes populaires de Kim Hoang sous la guidance
d’artisans.  Photo : Cong Dat  



Contrairement aux estampes populaires de Dong Ho, les artisans de Kim Hoang n’utilisent qu’une seule planche en bois
pour imprimer des dessins.  Photo : Khanh Long

Outre Mme Thu Hoa, le jeune artisan Dao Dinh Trung, du village de Kim Hoàng, a recherché des planches dans les maisons des habitants et exploite les dessins d’anciens livres afin de raviver cet artisanat de son village natal.

Selon Dao Dinh Trung, les estampes populaires de Kim Hoàng ont des similitudes avec celles de Dong Ho de la région du Kinh Bac, au Nord de la capitale. Cependant, elles ont leurs propres particularités intéressantes. Le matériel pour fabriquer des estampes populaires de Kim Hoàng n’est pas le papier do (papier de rhamnoneuron) des estampes populaires de Hang Trong ou le papier do enduit de nacre (giay diep) de leurs consoeurs de Dong Ho, mais le papier rouge ou rose. C’est pourquoi, les estampes populaires de Kim Hoàng sojny aussi appelées « les estampes rouges ».

Si pour les estampes populaires de Dong Ho, chaque dessin nécessite différentes planches en bois, chacune correspondant à une couleur et à un tour d’impression, pour les estampes de Kim Hoàng, les artisans n’utilisaient qu’une seule plaque pour apposer des images noires sur le papier. Ensuite, il ajoutait des couleurs et des traits supplémentaires qui dépendaient de l’émotion et de l’inspiration soudaine de l’artisan. Par conséquent, chaque image a un style unique contenant le talent individuel de chaque artisan, et ce même s’ils sont imprimés à partir d’une seule planche.

Comme toujours, ces images sont inspirées de la vie quotidienne des habitants du delta du fleuve Rouge. Le buffle, le bœuf, le cochon, le coq, les spectacles du village, les paysages des journées printanières, des marchés à l’occasion du Têt… y occupent une part prépondérante.   


D’excellentes estampes populaires de Kim Hoang imprimées et dessinées à partir d’une seule planche en bois. Photo : Cong Dat, Khanh Long














L’image la plus distinctive est celle de la paire de coqs, considérés comme "des coqs divins". Selon la conception des anciens, suspendre cette estampe dans la maison au début de l’année aidera à chasser les mauvais esprits,  apportera   paix au foyer. L’image du cochon est également appréciée pour ceux qui souhaitent une année heureuse et prospère.

Outre les images, on trouve sur les estampes de Kim Hoàng des vers en idéogrammes chinois écrits dans le coin supérieur gauche. Le poème et les images sur les dessins prouvent l’harmonie et la cohérence selon un certain ordre. L’artisan doit maîtriser  les caractères chinois, avoir du talent et du cœur pour créer les caractéristiques en traits et en couleurs, créant ainsi la distinction du mouvement de ces peintures folkloriques. ./.


L’exposition  « Peintures folkloriques du Vietnam et leurs applications », qui a eu lieu fin 2018 au Temple de la Littérature (Văn Miếu - Quốc Tử Giám) à Hanoi, a présenté plus de 200 dessins, près de 30 modèles, 45 autres produits dont cartes postales, sacs, foulards… décorés de motifs d’estampes populaires de Kim Hoàng. Cela montre que les estampes populaires de Kim Hoàng  reprennent progressivement leur place dans la vie contemporaine.

Texte : Cong Dat -  Photo : Khanh Long, Cong Dat

top