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Un maître de la peinture à l’aiguille

 La peinture à l’aiguille consiste à broder, avec un seul fil et de façon très réaliste, les sujets les plus variés. Nguyên Van Công est passé maître dans cet artisanat, que beaucoup considèrent comme un art à part entière. 


L’artisan Nguyên Van Công poursuit son travail. 

 La boutique de Nguyên Van Công, dans la rue Tôn Duc Thang à Hanoï, est décorée de manière très originale. Elle ressemble à une maison d’autrefois. L’artisan de 45 ans, né dans le district de Hâu Lôc, dans la province centrale de Thanh Hoa, a confié que «la broderie est généralement un travail de femmes. C’est le destin qui m’a amené à embrasser cette carrière». 

Nguyên Van Công est un maître de la peinture à l’aiguille. Une passion qui remonte à l’enfance : «Tout petit, j’ai vu des femmes broder des serviettes et des chemises pour les offrir aux jeunes qui allaient à l’armée ou partaient travailler loin de chez eux». 

Rappelons que la peinture à l’aiguille est une technique de broderie visant à reproduire un dessin, une peinture ou une photo sur une toile en remplissant le motif à l’aide de fils de soie ou de coton. La peinture à l’aiguille élève les brodeurs au rang d’artistes. Au Vietnam le métier de brodeur existe depuis le XVIe  siècle. C’est Lê Công Hành, mandarin sous la dynastie des Lê postérieurs (1427-1789), qui fut fondateur de la profession. Autrefois, la broderie était, selon la conception confucianiste du perfectionnement des quatre vertus, l’un des acquis indispensable à l’éducation d’une jeune fille. 

«L’art de la broderie consiste surtout en l’association de couleurs et de nuances, ainsi qu’en de multiples techniques sophistiquées. Le brodeur, un véritable artiste, est libre d’exprimer ses pensées et méditations sur la vie et la mort, l’espoir et le désespoir, la gaieté et la solitude…», a indiqué l’artisan. 

Bien que Nguyên Van Công ait suivi des études en électrotechnique à l’École normale supérieure des technologies de Hanoï, sa passion pour la broderie l’a amené à apprendre le dessin auprès de quelques amis qui étudiaient à l’École des beaux-arts. «J’ai décidé de suivre mon propre chemin, en accord avec ce que j’aime le plus, celui de la peinture à l’aiguille traditionnelle». 

Un artisanat qui a failli disparaître 

Nguyên Van Công a commencé son métier en 2008 et ses premiers professeurs furent les célèbres artisans Nguyên Cao Binh et Thai Văn Bôn. Il a effectué de nombreuses visites dans les villages de broderie traditionnels du Nord les plus connus tels que Quât Dông (en banlieue de Hanoï), Xuân Neo (Hung Yên), Van Lâm (Ninh Binh) et Minh Lang (Thai Binh) pour étudier davantage cet artisanat. Il s’est rendu compte d’une triste réalité : de nombreux artisans quittaient le métier et peu de jeunes reprenaient le flambeau. «J’ai vu que des brodeurs n’avaient plus de passion pour cet artisanat, ce qui m’a rendu à la fois triste et inquiet. J’étais déterminé à relancer ce métier traditionnel», a-t-il affirmé. 

Ces dernières années, les tableaux brodés vietnamiens ont souffert de la concurrence de leurs homologues venus d’ailleurs. «Mais il reste de nombreux Vietnamiens qui apprécient les peintures brodées traditionnelles. Pour les séduire, je brode des scènes de la campagne vietnamienne», a partagé l’artisan Công. 

La peinture à l’aiguille est réalisée avec une infinité de nuances de fils de soie, mais les points de broderie utilisés restent très simples. Avant d’enseigner les techniques à ses apprenants, l’artisan Nguyên Van Công leur explique l’histoire et l’essence de la broderie vietnamienne. «La  passion ne suffit pas, a-t-il estimé. Créer un tableau brodé traditionnel nécessite d’avoir un bagage technique, qui s’acquiert avec l’expérience». 

Actuellement, Nguyên Van Công compte dix ateliers à Hanoï et dans certains villages de métier des provinces voisines, qui emploient environ 200 travailleurs. Ses tableaux montrent souvent des paysages ruraux du delta du fleuve Rouge, avec banians, maisons communes, vieilles pagodes, haies fleuries… 

Originalité de la broderie double face 

Parmi les milliers de tableaux que Công et ses élèves ont créés, bon nombre ont été achetés par des clients étrangers pour de grands hôtels ou des musées. La peinture à l’aiguille double face est réservée à l’élite des brodeurs. «Ce genre de tableau n’est pas fait pour être accroché mais pour être exposé, a-t-il partagé. Les espaces blancs sont de la soie fine et nous pouvons voir à travers. Seuls les maîtres peuvent faire ce type de produit car la moindre erreur gâte l’œuvre». Comme ces œuvres nécessitent beaucoup de temps, leur prix peut monter jusqu’à plusieurs centaines de millions de dôngs. 

Pour M. Công, l’argent n’est pas la motivation principale, loin de là. «Ce que je souhaite par dessus tout, c’est pérenniser ce métier qui a bien failli disparaître. En outre, j’espère que la broderie sera enseignée dans les écoles afin que de plus en plus de jeunes se prennent de passion pour cet art et en fassent leur métier».-CVN/VNA/VI


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